Tu dis EntrepreneuRE ou EntreprenEUSE ?


Salut Reader,

Comment ça va de ton côté ?

Ici, cette semaine c'était la reprise sur les chapeaux de roues. On est passées du calme plat et inbox zéro dans mes e-mails à 36 notifications par heure.

En tout cas, j'espère que tu réussis à reprendre le rythme 🤯

Aujourd'hui je tente un nouveau format : le billet d'humeur.

Comme toujours, tu peux à la fin me répondre pour me dire ce que tu en as pensé.

Dans cet article je t'explique pourquoi dire « entrepreneuse » au lieu d’« entrepreneur » (même si je me fais souvent reprendre)

Derrière les mots se cachent des rapports de pouvoir, des modèles et des imaginaires.

Temps de lecture : 2 minutes


La langue française a invisibilisé les femmes

Exemples historiques Prenons le mot autrice.

Ce terme, utilisé au Moyen-Âge pour désigner une femme qui écrit (normal !).

Sauf qu’il a été délibérément supprimé au XVIIe siècle par l’Académie française (globalement un groupe de mec blanc qui impose leur choix sans rien demander à personne).

Bref, il a décidé qu’il était plus convenable de dire “femme auteur”.

Ce choix nous a ainsi renvoyées à une posture d’exception, jamais d’égalité. Un auteur est par défaut un homme. Sauf quand le contraire est précisé !

Le langage a également joué un rôle dans la division genrée des métiers.

Les professions valorisées historiquement – comme “médecin” ou “avocat” – sont restées masculines.

En revanche, les métiers subalternes – “infirmière”, “assistante” – ont été féminisés.

On a ainsi créé dans le langage une hiérarchie implicite des genres (les job moins valorisés pour les femmes et les plus valorisés pour les hommes).

Ce processus ne s’est pas arrêté là.

Des termes comme doctoresse, ont progressivement disparu, ou sont jugés archaïques voire ridicules.

Sauf que laisser ces mots s’effacer, c’est accepter une invisibilisation continue des femmes dans le langage et les représentations.

C'est pour continue de voir et d'entendre des femmes que je mets ces mots au féminin.


Les preuves scientifiques : pourquoi les mots comptent autant

Maintenant, tu peux me dire "oui, mais bon c'est juste des mots".

Non.

Une étude menée par Harris-Interactive a démontré l’impact des formulations inclusives et épicènes (qui désigne indifféremment l'un ou l'autre sexe ou genre) sur la représentation mentale des femmes.

Trois groupes ont été confrontés à différents types de formulations : genrées (masculines par défaut), inclusives (mentionnant explicitement le féminin), et épicènes (ne spécifiant aucun genre).

Voici les résultats

  • Les présentateurs de journaux télévisés : Avec une formulation épicène (« deux personnes présentant le journal télévisé »), 51 % des participants citent au moins une femme. Ce chiffre tombe à 41 % avec une formulation genrée (« deux présentateurs du journal télévisé »).
  • Les figures littéraires : L’utilisation d’une formulation inclusive (« deux écrivains ou écrivaines célèbres ») double le nombre de femmes mentionnées par rapport à une formulation genrée (« deux écrivains célèbres »).
  • Les champions olympiques : Avec une formulation épicène (« deux personnes ayant été championnes olympiques »), 33 % des participants citent au moins une femme, contre seulement 17 % avec une formulation genrée (« deux champions olympiques »).

Cette étude montre que les mots façonnent directement nos représentations mentales.

En utilisant des formulations inclusives ou épicènes, on intègre activement les femmes dans l’imaginaire collectif. Et, indirectement, on contribue à ce qu'il y en ait plus.

À l’inverse, le masculin générique continue d’invisibiliser les femmes, et, renforce l’idée qu’elles n’ont pas leur place dans certains domaines.


Dire entrepreneuse devient un acte militant

Pour moi, dire entrepreneuse au lieu d’entrepreneur est une manière d’affirmer que nous avons notre place dans l’entrepreneuriat.

Reste le combat sonore : EntrepreneRE

L’écriture inclusive (« entrepreneur·e » ou entrepreneure) est utile à l’écrit mais reste inaudible à l’oral. Or, le premier vecteur de transmission culturel est l'oral.

Quand on entend “un entrepreneur”, même avec un E invisible à l’écrit, l’image qui se forme reste majoritairement masculine.

À l’inverse, utiliser des termes comme entrepreneuse, autrice ou doctoresse participe à rééquilibrer ces représentations et offre aux jeunes filles des modèles auxquels s’identifier.

Je ne vais pas te mentir, ce choix peut provoquer des réactions.

Dire “entrepreneuse” semble déranger certains, mais c’est justement là que le sujet commence.

Ce mot gêne car il perturbe des normes culturelles solidifiées par des siècles de patriarcat.

Et, c'est précisément la raison pour laquelle nous devons nous en emparer.


Les grands changements passent par des petites choses

Si toi aussi tu as envie d'être un relais dans le fait de voir plus de femmes à des positions de pouvoir, d'argent, de responsabilité.

Tu peux aussi choisir de les rendre visibles par les mots.

  1. Oser dire les mots féminins à l’oral : Parler d’une “entrepreneuse” ou d’une “doctoresse” sans hésitation.
  2. En parler autour de soi : Expliquez vos choix dans vos conversations, publications sur LinkedIn ou articles de blog.

(si tu n'en as pas envie c'est ok. On a déjà beaucoup à faire avec nos vies)

En écrivant cet e-mail, j’ai en tête la chanson de Fatal Bazooka (oui, je suis née dans les années 1990. Mais jamais je n’aurais pensé citer ces paroles dans un e-mail envoyé à des milliers de personnes 😅). Les paroles sont très vulgaires, mais elles montrent si bien à quel point notre langue porte des biais sexistes. Il compare des mots et leur pendant féminin, et on observe à quel point les mots féminins sont connotés négativement.

Un gars, c'est un jeune mec, et une garce, c'est une p*te
Un coureur, c'est un joggeur, et une
coureuse, c'est une p*te
Un chauffeur, il conduit l'bus, et une
chauffeuse, c'est une p*te
Un entraîneur, c'est un coach sportif, et une
entraîneuse, bah c'est une p*te
Un homme à femmes, c'est un séducteur,
une femme à hommes, c'est une p*te
Un chien, un animal à quatre pattes, une
chienne, c'est une p*te
Un cochon, c'est un mec sale, une
cochonne, c'est une p*te
Un salaud, c'est un sale type, une
salope, bah c'est une p*te

D'où l'intérêt de nous les réapproprier et de créer d'autres imaginaires.


Conclusion

Les mots ne sont jamais neutres.

Dire “entrepreneuse” n’est pas un détail : il montre notre façon de voir le monde.

Ce détail permet à toutes les générations, et notamment aux jeunes filles, de se projeter sans distinction de genre.

C'est notre mot ❤️


Reader, j’espère que cet e-mail t’a plu.

Comme tu le sais, Le Divan des Patronnes est mon tout nouveau projet, et vous êtes déjà +1.200 à me lire.

Pour le moment rien n'est encore publique. C'est une avant première pour vous.

Mais, si tu penses que cet article peut intéresser une autre entrepreneuse géniale (comme toi), transfère-lui cet e-mail.

Et, si tu veux simplement papoter ou me donner de tes nouvelles, il suffit de répondre directement à ce message.

Je réponds personnellement à tout le monde.

à très vite,